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Le seul vrai hétéro
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2 janvier 2020

Résumé à l'égard des lecteurs pressésMais où

Résumé à l'égard des lecteurs pressés

Mais où réside donc ce fameux résidu sexuel ? S'il s'agit de ne pas faire comme si l'on n'avait jamais l'impression qu'il existait, il s'agit en revanche – aussi et surtout – de ne pas se contenter de l'affirmer comme une évidence hypocrite, hypocrite car l'on admettra dans le même temps que son contenu est variable selon les temps.
Nos caractéristiques accolées ne tiennent à rien, ou plutôt ne tiennent qu'à ce qu'a bien voulu nous réserver l'époque. Et quand bien même cela se serait imprimé dans notre cerveau, ce dernier ne fait (avant tout) qu'être immergé dans son contexte depuis son arrivée dans le bain.
Il faut passer directement à la deuxième proposition, bien plus fructueuse : c'est carrément le sexe qui est créé, le découpage en deux entités irréductibles qui est retenu comme la pertinence fondamentale de toute culture à dynamiter. On est obnubilé par ce critère génital devenant critère superstructurel – matériel et spirituel à la fois – , alors qu'on aurait pu nous différencier selon le nez ou le genou, par exemple. 
Contre-argument évident (trop évident ?) : la reproduction sexuée ayant gouverné nos vies depuis la plus grande partie que nous sommes là, on comprend que ça ait tourné la tête des chefs et qu'ils aient décidé de l'ériger en base discriminante.
Contre-contre argument révolutionnaire, contextuel, excitant, malicieux : maintenant que ce n'est plus le cas, que l'on fait ce qu'on veut, on pourrait pas arrêter avec ça ? Notre génitalité ne dira plus rien de nous, c'est décidé. Ou alors si elle dira, ce sera de façon volontaire et créative, on la tournera comme on veut, on la mélangera à tout ce qu'elle n'est pas pour qu'elle devienne ce qu'on a décidé qu'elle soit – ce qui a, après tout, toujours été le cas : nos sexes ayant déjà suffisamment servi à tout et n'importe quoi (à la justification de tout et son contraire), pourquoi n'aurait-on pas désormais le droit d'avoir la maîtrise de cette création (qui a, oui, toujours été la nôtre) ? 

Tout cela, on ne voit pas comment le nier, le refuser. Peur de quoi ? D'enfin aimer pour aimer ?

Mais par contre, si l'on est sincère deux secondes, tentons de répondre à ça : qu'est-ce que l'on ressent pour l'autre, pourquoi et comment le ressent-on, qu'y a t-il en nous à ce moment, pourquoi est-on tourné(e) vers lui/elle ? 
La scène militante jette un voile pudique sur ces introspections. Cela n'est pas politique. Et même si l'on a dit que le privé était politique, reste une partie du privé pour lequel l'on ne tiendra jamais à trouver les mots. Ça veut pas.
Bon, très bien, prenons “aussi bien genou que sexe” ; classons les humains par genoux ; maintenant réponds à la question : ce par quoi cette personne te rend tout.e chose, est-ce vraiment par son genou ? Pas davantage par son sexe à proprement parler, répondras-tu (physique ou spirituellement hypostasié), mais par son paysage, son être, tout ce qu'elle est. Oui. 
Mais coup de théâtre : à cette sensation de poussée vers elle, vers cette personne vers qui tu es orienté car elle est tellement elle, correspond à chaque fois une fantasmatisation de ses données sexuées. Sans que tu puisses t'en empêcher ? Certes, mais tu as appris à diriger le truc dans tous les sens, à ne pas être dupe des fausses consciences (identités fixées) ; tu t'es émancipé de la mystique de l'irrépressible qui t'emprisonnait dans le sexe, mais rien à faire, objectivement, ça se voit que tu considères tout de même ces données à un endroit de toi. Et c'est peut-être juste ça, l'irréductible. Rien de plus, mais ça l'est, c'est ça.

Ce à quoi nous sommes semble t-il condamnés, ce n'est non pas la séparation sexuée dans la réalité, mais la coloration fantasmatique de données émotionnelles par une gamme d'impressions à base sexuée.
Mais à partir du moment où on sait que c'est en nous, on peut en faire ce qu'on veut.

Mille fois mieux qu'avant, plein de sources de plaisir entremêlées : si excitant de se dire que cette personne est un être humain comme nous, qu'on l'aime pour ça et non pour son sexe (c'est fou tout ce qu'on va pouvoir faire ensemble qu'on n'aurait jamais fait avec quelqu'un de formé selon son sexe !) ; et derrière cette sensation-là, comme une absence-présence, le vif sentiment que tout de même il y a quelque chose d'irréductible en elle qui vient de ce que l'on vise des émotions reliées à ce que l'on perçoit de sexuellement troublant en elle, que c'est en arrière-plan et pas si important qu'on ne le dit (personne n'est plus là à s'écrier « je suis orienté vers ceci, vers ceci, vers ceci je vous l'diiiiis ») mais que ça laisse rêveur, hein.

On en rêve encore, c'est tout ce qu'on garde encore de ça.

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