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Le seul vrai hétéro
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25 décembre 2023

Ma seule façon de ne pas devenir fou, c'est de me

Ma seule façon de ne pas devenir fou, c'est de me dire que je ne suis pas un mec.
Si elle ne m'a plus aimé, c'est parce que je ne pouvais pas être un mec ; j'aurais fini à un moment ou à un autre par ne pas pouvoir continuer à être un mec. 
Ma seule façon de donner sens à ce qui s'est passé, de créer un récit où je sois un individu poursuivant une vie, c'est de penser la fin de la supercherie : je n'étais tout simplement pas un mec, je ne suis tout simplement pas un mec. C'est le même individu dont il s'agira durant les quelques années qu'il me reste. C'est m'endosser enfin, c'est l'assomption.
Puisqu'il faut que la détonation ait servi à quelque chose pour ne pas devenir fou, on va dire que ça m'aura définitivement sorti de quelque chose, la position masculine, que je n'étais jamais parvenu à faire mienne. 
Je ne délire pas, ou pas complètement – ou disons que je délire simplement pour ne pas devenir fou –, je me rappelle que les seules fois où j'étais mal à l'aise, c'est parce que je sentais qu'on attendait de moi que je sois un mec. C'était sans doute implicite, inconscient, et en partie une projection de ma part, mais une projection a des raisons, elle s'appuie sur une structure sensée, j'ai dit que je cherchais un sens, j'ai trouvé celui-ci : j'entendais qu'elle me disait que j'étais un mec (donc que je devais l'être, mais le problème ne réside pas tant dans des injonctions que dans la constatation ; c'est la constatation qui produit d'emblée une attente).
Si je dois trouver une origine du malaise pour ne pas devenir fou, on va dire que ce sera celle-là : de toutes façons, je ne pouvais pas être un mec. C'est cela maintenant qu'il faut poursuivre, puisqu'il paraît qu'il faut poursuivre quelque chose : j'ai pris acte, puisqu'il paraît qu'il faut prendre acte de la détonation, du malaise, pour ne pas devenir fou : c'est parce que je n'étais, ne suis et ne serai pas un mec. Le passé trouve sens dans le présent qui trouve sens dans le futur. Dans cet ordre-là. 
J'ai compris le message. Ou plutôt, le but de tout ça c'est de le comprendre, de le comprendre enfin, c'est la leçon à tirer, qu'il faut comprendre ça. 
Je suis prêt, et même mieux que ça, c'est la seule chose que j'accepte dans l'histoire. Je n'accepte rien hormis ça, hormis cette confirmation que je ne suis pas un mec. C'est la seule confirmation qui me réjouit, que j'endosse. 
Je me dis que j'aurais pu m'en rendre compte de mille façons, le fait est qu'il a fallu en passer par là, il faut bien une causalité à tout : c'était pour enfin me dire de ne plus être un mec, dans le genre carrément. En comprenant tout ce que ça implique. 
Maintenant, il devra s'agir à la fois du même individu et d'une réelle prise de conscience que si cet individu doit continuer à vivre, il faudra qu'il ait compris : il n'est pas un mec. Tout de suite, même dans le malheur, même dans la détonation, ça soulage.
On pleure toujours, mais au moins maintenant en pleine conscience : on sait qui on n'est pas. Du moins je crois qu'on le croit. 

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